Rencontre avec deux influenceurs voyage nantais
Rencontre avec deux influenceurs voyage nantais

Entre partenariats avec les marques, proximité avec la communauté et rôle social émergent, découvrez le parcours et le métier de deux influenceurs nantais au travers de cet interview.

 

Pourquoi avez-vous décidé de devenir blogueurs ?

 

Myrlène : ça fait bientôt 10 ans que je blogue. J’ai commencé en 2008. A l’époque ce n’était pas reconnu ou rependu, c’était assez confidentiel. J’habitais dans une ville pas loin de Nantes où il ne se passait pas grand-chose, et bloguer était un moyen pour moi de partager avec des gens les activités que j’avais. Effectivement j’avais peut-être 3 personnes qui me suivaient et qui venaient de temps en temps mettre des commentaires. J’ai eu plusieurs blogs sur différentes problématiques, dont un que j’ai lancé il y a 7 ans bientôt, Mimi Cracra, un blog déco.

 

Clément : Quelques années plus tard elle m’a embrigadé dans l’affaire. On s’est vite rendu compte qu’on avait plusieurs points communs, notamment en ce qui concerne la culture, la découverte de marque, le voyage… Je me suis laissé aller à cette aventure, car c’est super sympa de pouvoir témoigner de certaines choses, d’avoir le privilège et l’avantage de profiter de certaines choses aussi, et de pouvoir le retranscrire et donner envie aux gens. Ce qui nous pousse, c’est pouvoir faire découvrir des choses aux lecteurs et avoir des retours : soit des lecteurs, ou encore les gens dont on a parlé, qui nous disent « grâce à votre article, des gens sont venus ». C’est vraiment pour faire découvrir, partager.

 

Est-ce votre activité professionnelle ?

 

Myrlène : ça l’est en partie,  indirectement. L’écriture d’articles me permet de générer certains revenus sur les articles sponsorisés et les tests de produits, mais ça reste limité. Je ne fais pas souvent d’articles sponsorisés, peut-être une fois tous les 3 mois. Ça m’offre certaines opportunités professionnelles. Etant donné qu’il s’agit d’un blog de loisir créatif, je peux par exemple animer des ateliers. Aujourd’hui, j’anime une chronique sur France 3 tous les jeudis, et je suis payée pour ça.

 

Clément : On gagne l’opportunité et la chance de découvrir des choses touristiques et lifestyle. La dernière en date est une nuit dans une chambre d’Hôte que l’on a faite il n’y a pas très longtemps. On fait plutôt des découvertes et des tests à titre gratuit, sans rémunération. Ce n’est pas ce qui nous motive.

 

Vous travaillez à partir du blog, et sur les réseaux sociaux. Lesquels utilisez-vous ?

 

Myrlène : Selon la régularité des publications, on utilise plutôt Instagram. Le réseau nous permet d’avoir un lien beaucoup plus instantané avec la communauté. Sur le blog, on passe du temps à écrire des articles, à choisir des photos, alors qu’avec Instagram, on essaie de témoigner d’instant passé dans un endroit, dans un lieu. On ne fait pas forcément des articles, c’est vrai qu’un post Instagram pour montrer que l’on a découvert tel bar ou tel restaurant, c’est amplement suffisant.

 

On vous considère comme étant des micro-influenceurs. Etes-vous souvent sollicités par des marques pour des tests de produits, des essais de services ?

 

Myrlène : De plus en plus. Cette semaine nous avons encore reçu des mails. À Nantes et autour, on se rend compte qu’il y a un véritable engouement pour le marketing d’influence. Si on peut identifier cela comme des marques, ça serait plus les offices de tourisme et les activités de loisirs étant donné qu’on est plutôt dans le voyage et la découverte.

 

Quelle position prenez-vous par rapport à ses marques qui vous sollicitent ?

 

Myrlène : Lorsqu’une marque s’adresse à nous, on va toujours essayé de rester dans une notre ligne éditoriale. On a déjà eu par exemple des propositions de services de taxi ou encore de ménage à domicile, qui ne correspondent pas à ce que l’on souhaite faire découvrir.

Sur Mimi Cracra, le positionnement est différent. J’essaie de rester dans ma ligne éditoriale car d’une part je ne me sens pas légitime de parler de produits ménagers, par exemple, car ça vient comme un cheveu sur la soupe, mes lecteurs en face vont se dire qu’il y a quelque chose qui ne va pas. D’autre part, car j’aurais beaucoup de mal à en parler de manière honnête. Je ne vois pas ce que je pourrais apporter de plus car pour moi, faire appel à un influenceur ou à un blogueur, c’est vraiment chercher une touche différente par rapport à un discours publicitaire traditionnel.

Effectivement je peux comprendre l’attrait de ce genre de proposition, mais à ce moment-là on dérive vers de la publicité traditionnelle sans valeur ajouté.

 

Vous travaillez avec les marques selon votre secteur de prédilection ?

 

Clément : Oui et on y tient, pour ne pas dériver. Un jour on va avoir un article sur la découverte d’une chambre d’hôte et le lendemain sur du Febrez ? Non ! Ce n’est pas logique, et nous on souhaite être cohérent.

 

Pour vous, la transparence de la marque est-elle nécessaire à un partenariat ?

 

Myrlène : Pour nous oui, c’est mieux s’il y a une certaine transparence. Nous, nous allons être le plus transparent possible dans notre article. Si certaines choses ne nous plaisent pas, on ne va pas les mentionner car bien sur notre rôle n’est pas de démonter les marques, ou alors on va juste faire une petite phrase pour nuancer notre propos car tout n’est pas toujours rose et positif. Si c’est insupportable, effectivement on en parlera pas, parce que ce qui ne nous plait pas à nous peut plaire à d’autres personnes.

Et a contrario, même si le produit nous a plus à 100%, on essaie de rester objectif et de parler des potentiels mauvais côtés parce que ce sont des choses intéressantes à savoir.

 

D’un point de vue marketing et publicité, qu’est-ce que vous apportez dans la communication d’une marque ?

 

Myrlène : Je pense qu’on apporte de la communication de proximité et un regard moins conventionnel : quelque chose de plus farfelus, tourner vers un côté plus fun, dans nos états d’esprit. Les gens comme nous, qui tenons des blogs, ne sont pas forcément issus de filières de communication, nos fondamentaux à nous ne sont pas les plans et les outils mais l’orthographe et la grammaire, et après ce n’est que de la création.

 

Clément : Il y a effectivement ce côté de proximité avec les gens, car ils aiment beaucoup les blogs. Mais selon les personnalités, le ton change. On a aussi un public, si on fait appel à nous c’est parce que l’on a une communauté et les gens nous suivent car on leur fait des recommandations, et c’est un moyen indirect ou plus direct de toucher les gens, mais aussi plus sincère.

 

Par rapport à vos communautés, quels rôles pensez-vous avoir ? Vous considérez-vous comme étant légitimes ?

 

Myrlène : J’ai beaucoup de mal avec le côté « légitimité » j’essaie de trouver des choses qui vont plaire, mais aussi des choses qui me plaisent à moi. On est quand même assez nombreux à aimer les mêmes choses, mais je ne me positionne pas en lanceuse de tendance. J’essaie de continuer à faire des choses pour moi, tout en souhaitant que mes articles soient lus. Ce n’est vraiment pas simple, car on ne peut pas se dire que l’on va tout révolutionner. On est dans un monde où la communication et les tendances sont très marquées. On essaie d’être dans cette tendance mais de faire notre truc à nous.

 

Clément : Sur Nantes, la légitimité on peut l’avoir dans le sens où nous sommes des personnes comme les autres, et ce que l’on cherche à partager ce sont des choses accessibles tout simplement. Selon les personnes, ils y trouveront leur compte. Et c’est ce qui fait une communauté : les gens s’identifient à nous parce qu’ils ont été aux mêmes endroits, ils voient les mêmes choses…

 

Avez-vous déjà eu le cas de personnes qui remettent en cause votre discours par rapport à votre activité d’influenceur ?

 

Clément : Non, heureusement, ça ne nous est jamais arrivé. Cependant, on a eu des remarques de personnes qui, quand on leur disait qu’on était blogueurs, avaient cette image du blogueur-profiteur. Ce sont des personnes qui ne connaissaient pas forcément ce que l’on faisait, mais qui nous identifiaient aux autres blogueurs qui agissent comme ça. Les gens pensent que l’on parle de quelque chose uniquement parce qu’on a bénéficié de services gratuits. Effectivement, si on nous propose de découvrir des choses, on y va et on en parle. Même s’il y a ce côté invitation et gratuité de la découverte, nous ce sur quoi on s’engage, c’est faire comprendre qu’on a passé un bon moment. C’est vrai qu’on profite, mais après on peut partager une expérience positive.

 

Myrlène : C’est là que la question de la ligne éditoriale est importante : on peut être tenté de participer à tout de par le caractère gratuit du service, mais c’est là où on se perd. On ne peut pas reprocher aux gens de profiter de choses gratuites, mais si on est honnête et qu’on dit les choses clairement, il n’y a pas de soucis. Si on fait des articles toutes les semaines, en présentant systématiquement des choses que nous n’avons pas payées, ça pose un problème éthique, même pour nous. Je peux comprendre que les gens soient méfiants. Personne ne nous dit qu’on est des arnaqueurs car on n’a pas un rythme de publication effréné, on prend le temps de faire des choses qu’on aime et d’en parler.

 

Lorsque vous faites des activités de votre plein gré et que vous en parlez, quelle est la réaction des marques ?

 

Clément : Ça arrive qu’elles fassent un petit geste. Par exemple, le premier article que nous avons fait été sur un restaurant de burgers. On y est allé, on a mangé, on a passé une bonne soirée, et sans leur en parler on a écrit un article. Quelques semaines après, on est revenu, on a vu qu’ils avaient affiché notre article, et ils nous ont offert une portion de frite. Rien de mirobolant ! Ce n’est pas comme Penelope Cruz qui demande « What did you expect ? », on « expect » rien du tout.

 

Myrlène : La relation la plus naturelle qui s’est construite s’est faite avec un office de tourisme. On a bien accroché, on s’est fait confiance et de fil en aiguille on a commencé à participer à de nombreuses activités. Nous on essaie de faire confiance aux gens, c’est là où la part de relationnel joue et qu’on oublie la communication et le marketing. Une marque sera très sensible au relationnel qui peut se nouer, on part d’une relation commerciale et ça peut déboucher sur une relation régulière basée sur la confiance.

 

En quelques mots, pouvez-vous me décrire votre rôle d’influenceur ?

 

Premièrement, il faut du temps.

Ensuite, je dirais que c’est de la découverte.

C’est aussi de la recherche, car c’est important de savoir de quoi on parle avant d’en parler aux autres.

Mais avant tout, c’est avoir envie de partager des choses qui nous tiennent à cœur.